Trésors et légendes de la Mer : à Paris, le nouveau Musée national de la Marine ouvre ses portes

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À voir les foules massées devant les remparts de Saint-Malo pour assister au départ de la dernière Route du Rhum, l’univers marin semble toujours exercer une puissante fascination sur le grand public. Mais, au-delà de ces vaines courses au record sur des monstres pilotés par GPS, la mer a des histoires plus passionnantes à nous raconter, des récits de voyages au long cours, de luttes homériques contre des flots impétueux, de commerce et de trafics en tous genres, de guerre et de violence aussi. Tous ces récits forment la substance du nouveau Musée national de la Marine, au palais de Chaillot à Paris, entièrement restructuré sous la houlette des agences h2o et Snøhetta, et installé dans une scénographie signée par l’agence Casson Mann.

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Un musée vivant

À la fois pédagogique et patrimonial, il se présente comme un musée vivant en prise avec les grandes préoccupations de notre époque, mais aussi inscrit dans un temps long pour mieux les mettre en perspective. Pollution, réchauffement climatique, destruction des écosystèmes marins, explosion du commerce international, surexploitation des ressources halieutiques (la pêche), mers et océans concentrent en effet les problèmes les plus aigus, auxquels une partie du parcours est naturellement consacrée.

Façade du musée national de la Marine © Musée national de la Marine - P.Dantec

Façade du musée national de la Marine © Musée national de la Marine – P.Dantec

Ce sont « les traversées », trois espaces semi-permanents, voués à être renouvelés tous les trois à cinq ans, qui s’attellent à ces thématiques sensibles. La première « traversée » se pose au Havre, point d’observation privilégié à la fois pour la pêche, le transport de marchandises et de passagers et la production d’énergie éolienne. La rationalisation toujours plus poussée dont témoignent ces différentes activités n’a pas suffi à écarter l’aléa propre à toute navigation : des navires continuent de sombrer, victimes de la fureur des océans.

Vue du hall d'entrée. © H2O architectes-Snohetta

Vue du hall d’entrée. © H2O architectes-Snohetta

Tempêtes et naufrages – c’est le thème de la deuxième « traversée » – ont rythmé l’histoire, de la disparition de l’expédition La Pérouse dans le Pacifique en 1788 aux récentes marées noires. Face aux éléments déchaînés, la terreur et l’effroi le disputent à une fascination tout esthétique, comme le souligne, par exemple, L’Incendie du Kent (1825) de Théodore Gudin, fresque à grand spectacle de quatre mètres sur trois !

Politique en mer

Enfin, la domination des mers constitue un projet politique et militaire auquel notre pays a consacré d’énormes moyens depuis le XVIIe siècle, avec un succès variable… Cette histoire de la France comme puissance navale occupe le troisième temps des « traversées », nous rappelant, à cette occasion, que le musée est placé sous la tutelle du ministère des Armées. Où l’on nous raconte comment, depuis Richelieu, a été constituée et transformée la marine de guerre dans une course perpétuelle à l’innovation.

Vue intérieure du Musée national de la Marine, Palais de Chaillot, chantier de rénovation, 2023, h2o architectes et Snøhetta © Patrick Tourneboeuf/ Oppic/Tendance floue.

Vue intérieure du Musée national de la Marine, Palais de Chaillot, chantier de rénovation, 2023, h2o architectes et Snøhetta © Patrick Tourneboeuf/ Oppic/Tendance floue.

Entre chacune de ces vastes sections ont été ménagées quatre « escales », où l’intérêt historique se mêle d’une forte composante esthétique. Là, il ne s’agit plus seulement de s’instruire et de comprendre, mais aussi d’admirer. La sculpture navale, en premier lieu. Entre autres trésors, le Musée national de la Marine conserve quelques exceptionnels témoignages de cet art très politique. En majesté trônent les sculptures de La Réale, une galère construite en 1688, puis reconstruite en 1694 à l’arsenal de Toulon. Ce décor en bois doré évoque la course du soleil, personnifié par Apollon, au fil des saisons. On voit le dieu régner sur le monde, entouré des divinités de l’Olympe. Il n’est pas difficile de voir là une allégorie à la gloire de Louis XIV, lecture encouragée par la présence de fleurs de lys.

Paul Bonnifay, Figure de proue du Charlemagne, 1851, bois, 185 x 65 cm © Musée national de la Marine - C. Semenoff - Tian-Chansky.

Paul Bonnifay, Figure de proue du Charlemagne, 1851, bois, 185 x 65 cm © Musée national de la Marine – C. Semenoff – Tian-Chansky.

Aux sources du musée

Changement d’échelle avec la collection de modèles, qui font à juste titre la réputation du musée. Cet ensemble exceptionnel nous amène aux sources de son histoire, en 1748 précisément, lorsque Duhamel du Monceau, inspecteur général de la Marine, offre à Louis XV les cent vingt-quatre modèles réunis au cours de ses visites aux arsenaux du pays. Depuis la fin du XVIIe siècle, on y fabriquait des reproductions exactes des navires, à la fois dans leur apparence et dans leurs techniques de construction. Destinées à l’origine à guider les charpentiers de marine, elles revêtent à l’époque de Duhamel une fonction plus pédagogique pour les élèves ingénieurs et officiers.

Traversée des tempêtes et naufrages © Casson Mann-LMNB

Simulation de la scénographie de la section « Tempêtes et naufrages » du future Musée national de la Marine © Casson Mann-LMNB

À l’instar du Royal Louis, certains modèles n’ont de réduit que le nom, puisqu’ils peuvent mesurer jusqu’à quatre ou cinq mètres de long ! Conservée au Louvre, la collection prend progressivement un caractère patrimonial et se trouve intégrée au Musée naval, créé par Charles X en 1827. Elle s’enrichit à la fin du XIXe siècle d’un volet ethnographique, quand l’amiral Pâris, directeur du musée, fait réaliser, d’après ses propres dessins, quelque deux cents maquettes de bateaux d’Asie et d’ailleurs. S’ils ont été conçus dans une perspective utilitaire ou documentaire, tous les modèles fabriqués entre le XVIIe et le XXe siècle brillent à nos yeux contemporains comme de véritables œuvres d’art.

Joseph Vernet, Vue du Port de La Rochelle (série des Ports de France), 1763, 165 x 263 cm Paris, Musée de la Marine © Musée de la Marine

Joseph Vernet, Vue du Port de La Rochelle (série des Ports de France), 1763, 165 x 263 cm Paris, Musée de la Marine © Musée de la Marine

Les célèbres Vues des ports de France mêlent aussi ces deux dimensions, elles qui devaient « réunir deux mérites, celui de la beauté pittoresque et celui de la ressemblance ». Ce sont les mots qu’emploie le marquis de Marigny, surintendant des Bâtiments du roi, dans une lettre adressée à Joseph Vernet, alors que le peintre est déjà à l’œuvre sur la commande. Celle-ci, qui l’occupa de 1753 à 1763, exigeait une représentation très précise des grands ports du royaume, de Marseille et Toulon sur la Méditerranée, à Bayonne, Bordeaux ou La Rochelle sur le littoral atlantique. Dans les quinze tableaux de grand format finalement réalisés, une attention toute particulière est réservée aux activités propres à chaque région, détaillées au premier plan. L’exposition de treize toiles de cet ensemble, déposées par le Louvre, offre un avantageux contrepoint aux modèles et aux éléments de sculpture navale, et en éclaire d’une certaine manière le contexte.

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La poupe de la Réale réinstallée dans la galerie Davioud du Palais de Chaillot ©Musée national de la Marine/2023

Entre les nefs d’hier et les porte-conteneurs d’aujourd’hui, les ports anciens et les grandes infrastructures logistiques modernes, c’est à un voyage dans l’espace et dans le temps que nous convie le Musée national de la Marine.

La mer à voir

Art du mouvement, le cinéma s’est, dès ses origines, frotté à la mer. Dans le sillage des pionniers sont nés des films légendaires : Finis Terrae, L’Homme d’Aran, Moby Dick, Le Grand Bleu, Titanic, Pirates des Caraïbes… La première exposition du Musée national de la Marine retrace l’histoire de cette fascination, en même temps qu’elle documente les moyens techniques toujours plus sophistiqués mis en œuvre pour filmer la mer.

: Jean Boyer et Anatole Litvak, Calais-Douvres, 1931, Universum Film, 80 x 68 cm. ©Cinémathèque française

Jean Boyer et Anatole Litvak, Calais-Douvres, 1931, Universum Film, 80x 68 cm ©Cinémathèque française

Un grand voyage ponctué de plus de trois cents œuvres – costumes, affiches, peintures, photographies, dispositifs de prises de vues et extraits de films – provenant, en grande partie, des collections de la Cinémathèque française.


À VOIR
​​​« Mer et cinéma »
Musée national de la Marine, palais de Chaillot
11, place du Trocadéro-et-du-11-novembre, 75 116 Paris
du 13 décembre au 5 mai

À LIRE
Le hors-série de « Connaissance des Arts » consacré au musée (n° 1046, 80 pp., 13,90 €).


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