En peinture, un riche panorama de la collection d’agnès b. ; en photo, rendez-vous avec les mosaïques de Barbara Crane ; et une plongée dans la culture inuite… Notre sélection d’expositions parisiennes à ne pas rater, sans dépenser un euro.
« Zion’s Lament » (2023), de Harmony Korine, à voir à la Fab. d’agnès b. (13e arrondissement). Harmony Korine
Publié le 22 octobre 2024 à 12h30
PEINTURE
La peinture figurative contemporaine dans la collection agnès b.
La styliste agnès b. possède bien plus qu’un œil : un esprit façonné par les rencontres et les aventures, bien loin des platitudes et des logos de l’art. Au gré de ses collaborations avec de jeunes artistes, vidéastes, peintres ou photographes, elle a acquis des œuvres qu’elle a toujours aimé promouvoir et exposer. À la Fab., elle montre un magnifique bouquet de peintures et de dessins figuratifs, de Robert Combas, Loulou Picasso, Harmony Korine (également cinéaste et poète, il présente ici une série de petits personnages fantomatiques), ou encore Claire Tabouret, Chéri Samba, Jean Claracq et Barthélémy Toguo. Un bel accrochage de plusieurs générations…
Fleury Joseph Crépin – Conjurer la guerre, peindre la paix
« D’emblée les toiles de Joseph Crépin exercèrent sur moi leur fascination. […] Cette œuvre transcende à mes yeux la vulgarité et la niaiserie courantes […] Elle est aujourd’hui de celles, très rares, qui m’aident à vivre… » écrivait, en 1948, André Breton. Cités, palais et monuments aux motifs colorés et à l’impeccable géométrie : plus de trente tableaux inédits du célèbre Fleury Joseph Crépin (1875-1948) sont exposés pour la première fois. L’occasion de retrouver à la librairie-galerie Métamorphoses, adresse très active à Paris dans le domaine des livres d’art et des curiosités artistiques, les merveilles d’un homme également sourcier et guérisseur, salué par Dubuffet et convaincu de pouvoir arrêter la guerre avec ses toiles…
Jacques Villeglé – Star
Il avait un pedigree long comme la main : né à Quimper en 1926, Jacques Mahé de La Villeglé aurait pu puiser à l’aise dans ses blasons familiaux pour bâtir son histoire. Il choisit une autre voie : celle de l’art. En 1960, il cofonde le groupe des nouveaux réalistes. Génie sans moyen, il se lance dans la cueillette d’affiches lacérées en pleine rue avec son copain Raymond Hains. « De la peinture abstraite déjà faite », disait-il malicieux. Deux ans après sa mort survenue à 96 ans, cette exposition emballante réunit ses chapardages d’affiches et ses compositions autour de la musique, du cinéma, du catch ou du théâtre de boulevard. Un Villeglé archi-vivant !
s Jusqu’au 26 oct., 10h-19h (sf dim.), 10h30-19h30 (sam.), galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois, 33-36, rue de Seine, 6e, 01 46 34 61 07.
Pierre Soulages/John Chamberlain
Le maître du noir (profond) face au grand artiste de la tôle (de voiture) froissée. C’est le surprenant dialogue mis en scène par la galerie Karsten Greve entre le peintre français Pierre Soulages (1919-2022) et le sculpteur américain John Chamberlain (1927-2011), qui ne furent ni amis ni complices. Constituée d’œuvres issues de la collection personnelle de Karsten Greve, l’exposition délivre de formidables pépites d’art : Janvier 1963, de Soulages, grande gouache sur papier crème marouflé sur toile d’une élégance folle, au côté de la sculpture de Chamberlain, Papagayo (1967), tout en plis et replis d’acier galvanisé, ayant longtemps appartenu à Andy Warhol ; ou la longue frise spectaculaire, Gondola Charles Olson (1982)…
PHOTO
Sergio Larrain – Valparaiso/Los Abandonados
« C’est à Valparaíso que j’ai commencé à photographier… en arpentant les collines, vers 1951… » Les mots du grand photographe chilien Sergio Larraín (1931-2012), avec ses silences en pointillé, font office de cartels dans cette exposition. On y découvre une quarantaine de clichés en noir et blanc, élégants, porteurs de mystère, datant surtout des années 1960, à son retour d’Europe. Dans le port animé de Valparaíso, Larraín compose ses images en intégrant les lignes de la ville escarpée, ses volées de marches, ses funiculaires, ses balcons entassés. Il plonge dans les nuits interlopes au bar Los Siete Espejos (« Les Sept Miroirs »), où des prostituées désabusées attendent les marins de passage. Selon Larraín, les photos, « magiques », venaient vers lui, comme celle célèbre, de 1952, de deux petites filles descendant un escalier…
Barbara Crane
Le Centre Pompidou offre sa première monographie européenne à Barbara Crane (1928-2019), photographe américaine à l’œuvre bigarrée, parfait point de rencontre entre formalisme et humanisme. S’y trouvent des séries d’images taillées dans le quotidien de Chicago, au sens propre et figuré. Car l’artiste joue souvent de la découpe de négatifs en mosaïques pour créer des tableaux composites. Cet effet de diffraction du réel lui permet d’introduire sa passion pour le hasard dans ses photos tirées au cordeau. Avant de se clore sur d’étonnants Polaroid, l’exposition chemine, en noir et blanc, entre scènes abstraites – une obsession de Crane pour l’architecture moderniste – et visages anonymes qu’elle prend en gros plans hallucinés, comme dans l’immanquable série « Wipe Outs » (1986). — R.G.
Jean-François Spricigo – Le vent se lève
En quête de rencontres avec les animaux et les humains, Jean-François Spricigo poursuit sa route sur une sente le menant des côtes de la Guyane aux forêts touffues du Canada. Une trentaine de ses clichés en noir et blanc, pris entre 2013 et 2023, très contrastés, plongent le visiteur dans une nature exubérante et sensuelle, comme les courbes de ces collines en Corse. Un lynx peut cracher de colère ; un faon, se reposer dans l’obscurité d’un sous-bois ; et une petite fille captée en gros plan, fermer les yeux devant l’objectif. Certains paysages apparaissent ouateux, d’autres se découpent en contre-jour comme un décor pour ombres chinoises. Spricigo, qui a reçu le prix Nadar en 2023, recherche « la justesse, l’intensité de l’instant qui rencontre sa nécessité ».
Tomasz Machcinski – American dream, I made it all because of you
Avant de voir l’ensemble fleuve des photographies exposées, deux vidéos présentant le Polonais Tomasz Machcinski (1942-2022) sont à découvrir. Artiste hors norme, mécanicien et photographe, Machcinski a réalisé plus de vingt-deux mille autoportraits, se transformant sans cesse devant l’objectif. Cet orphelin a cru jusqu’à ses 20 ans que l’actrice américaine Joan Tompkins était sa mère ; la comédienne correspondait avec lui dans le cadre d’un parrainage humanitaire. À l’âge adulte, Machcinski a démultiplié sans fin son moi fracassé. En tout, plus d’une soixantaine de ses portraits sont ici accrochés, dont quarante-deux clichés en couleurs sur un mur entier évoquant son fantasme de l’Amérique. Du glamour, et du grinçant aussi, car le performeur, pourtant grimé, ne cachait pas les ravages de l’âge. Une quête d’identité délirante et bouleversante.
CIVILISATION
Une coopérative artistique inuite dans le Grand Nord canadien
Il y a vingt-cinq ans était fondé au Canada le territoire du Nunavut, offrant aux Inuits un gouvernement autonome. Pour marquer cette date historique, le Centre culturel canadien déploie à Paris un ensemble d’œuvres d’art inuit exceptionnel. Il s’agit d’estampes et de sculptures rassemblées de longue date par un duo de collectionneurs franco-suisse, Claude Baud et Michel Jacot, qui ont contribué à faire connaître cet art en Europe. Des œuvres créées à la West Baffin Eskimo Cooperative de Kinngait (Cape Dorset, île de Baffin), le plus ancien atelier d’art inuit canadien, fondé en 1959 et d’envergure internationale. Des dessins inédits de Shuvinai Ashoona, l’un des grands noms de cette coopérative, viennent compléter l’exposition. Une rare et fantastique plongée dans des mondes spirituels, peuplés d’oiseaux et de créatures animales chimériques.
Grande ville
En écho à la parution de la troisième édition du Guide des Grands Parisiens, les Magasins généraux accueillent vingt-quatre artistes du monde entier pour une exposition sur les nouveaux imaginaires de la ville. Composée de peintures, de maquettes, de photographies, de vidéos, « Grande ville » ouvre l’horizon vers des modes de vie urbains plus conviviaux et inclusifs, des espaces moins agressifs. Dans sa série « My parallel universe », Paola Ciarska imagine des espaces sûrs à travers des compositions miniatures. Delphine Dénéréaz met en scène des plantes capables de vivre en milieu hostile, dans de grandes installations de grillages enrubannés. Le collectif (La)Horde réalise un portrait chorégraphique joyeux de Bondy… Dans cette exploration riche, les pionniers sont aussi bien représentés, avec l’artiste Tadashi Kawamata, le plasticien congolais Bodys Isek Kingelez, ou l’activiste Liz Christy, créatrice du premier jardin communautaire, à New York en 1973.
Lesage, 100 ans de mode et de décoration
Conservatoire des savoir-faire artisanaux d’exception créé par la maison Chanel, la galerie du 19M accueille une exposition à l’occasion du centenaire de la maison Lesage, référence mondiale en matière de broderie et de textiles de luxe. Conçu comme une incursion dans les fameux ateliers, le parcours évoque l’histoire de François Lesage, qui porta l’entreprise familiale au sommet, et les collaborations avec les grands noms de la haute couture, à travers des documents et des photographies. Un exposé des techniques et des différentes étapes de fabrication permet de se situer, grâce à des dessins et à des échantillons, au plus près de la création. Tandis que des modèles exceptionnels, vestes, tailleurs, robes du soir, donnent à voir des exemples concrets. Un tourbillon éblouissant de perles, de plumes, de strass, de paillettes, de rubans et de sequins.
Une brève histoire de fils (de 1960 à nos jours)
Historienne de l’art et critique, Domitille d’Orgeval réunit dix-sept artistes originaires d’Amérique latine et de plusieurs générations, pour une exposition autour du fil, dont les usages sont profondément ancrés dans les traditions vernaculaires ancestrales et dans la mythologie occidentale. Soit un panorama d’œuvres éclectique (tableaux, installations, vidéos), des années 1960 à nos jours, qui témoignent de diverses pratiques : tissage, tressage, nouage. Dans le sillage de Jesús Rafael Soto (1923-2005), figure majeure du cinétisme, Ivan Contreras-Brunet (1927-2021) a élaboré des constructions de grillages métalliques. L’artiste mexicaine Vanessa Enríquez propose deux créations à partir de bandes magnétiques VHS. La plasticienne franco-péruvienne Natalia Villanueva Linares fait œuvre de mémoire à l’aide d’anciennes bobines en bois. Laura Sánchez Filomeno présente un curieux cabinet de curiosités de broderies avec des cheveux… Le fil dans tous ses états !
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