Notre-Dame de Paris détruite et reconstruite sous l’œil des scientifiques

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Le terrible incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris déclenché vers 18 h 50 le 15 avril 2019 a fait s’effondrer une heure plus tard la flèche de style néogothique reconstruite par Eugène Viollet-Le-Duc au milieu du XIXe siècle. La chute de la grande structure de pierre et de bois, lourde de 250 tonnes, a provoqué la destruction d’une partie des voûtes de la nef, puis celles de la croisée du transept.

Le chêne de la charpente médiévale fut calciné. Les pompiers ont pu arroser les débris de la flèche récupérés ensuite au sol par des robots. Des éléments du tabouret laissaient encore voir le dernier cerne de la croissance radiale (un anneau par année) et même le cambium, l’écorce intérieure des arbres.

Les analyses dendrochronologiques ont déterminé que l’abattage du bois utilisé pour la construction de la flèche, longue de 93 mètres, avait été fait en février 1857 et encore à l’hiver 1858. Le journal d’Eugène Viollet-Le-Duc indique que les compagnons ont achevé le bel ouvrage une année plus tard.

La découverte a confirmé l’emploi du bois vert (plutôt que séché et durci). Il fallait donc procéder de même pour la reconstruction. D’autres pièces de charpente, calcinées celles-là, ont permis de comprendre qu’une partie de « la forêt » de la toiture avait été transportée par radeau de flottaison, deux siècles avant les premières mentions dans les archives de cette forme de drave.

Voilà le genre d’information qui a été livré la semaine dernière au colloque interdisciplinaire Naissance et renaissance d’une cathédrale. Notre-Dame de Paris sous l’oeil des scientifiques, organisé par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et le ministère de la Culture, à la Cité de l’architecture et du patrimoine, place du Trocadéro, à Paris. Un premier colloque tenu en 2022 a permis de préciser des axes d’études.

Cette fois, l’heure était au bilan des résultats, devant public, à quelques mois de la réouverture du monument restauré. Les présentations au colloque se sont organisées autour de sessions correspondant à autant de groupes de travail interdisciplinaires, à l’oeuvre depuis cinq ans pour étudier les structures bâties, le bois, la pierre, le verre, le métal, l’acoustique, et même l’émotion patrimoniale. Un groupe chargé du numérique interagit avec tous les autres.

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Rien à jeter

Martine Regert se rappelle très bien le choc ressenti en apprenant la catastrophe. « J’étais dans un train entre Nice et Paris quand j’ai découvert que la cathédrale était en train de brûler », raconte la spécialiste de l’archéologie biomoléculaire, directrice adjointe scientifique dans un institut du CNRS. C’est à ce titre qu’elle a vite été nommée chargée de mission pour fédérer les études scientifiques sur Notre-Dame. « Le lendemain, j’étais au CNRS, et les e-mails et les appels téléphoniques nous demandaient de ne rien jeter et de rendre le matériel disponible pour des études. Le bois, les pierres, le fer, tout ça, c’est du matériel de recherche et il fallait lancer des programmes d’études dans différents domaines. »

Elle s’est mise à la tâche avec le chimiste des matériaux Philippe Dillmann. Près de 200 spécialistes et quelque 50 laboratoires ont depuis participé à l’autopsie du bâtiment écorché.

Le président de la République a décidé de restaurer la cathédrale en cinq ans. La création de l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de Notre-Dame a donné aux scientifiques un accès au chantier extrêmement complexe où s’activent jusqu’à 500 spécialistes en même temps. Des mesures de sécurité très strictes compliquent toutes les interventions, et les agendas évoluent rapidement.

Les résultats de recherche aussi. Les conclusions savantes peuvent même influer sur les travaux de reconstruction. Le groupe de génie mécanique qui étudie la stabilité de l’édifice a été sollicité et a interagi de manière étroite avec les architectes en chef des monuments historiques, Pascal Prunet, Philippe Villeneuve et Rémi Fromont. La stabilisation des voûtes a bénéficié des modélisations et des nouvelles méthodes de calcul des forces agissantes.

L’avenir des débris

Des présentations au colloque ont porté sur l’évolution des techniques de construction et la chronologie des travaux étalés sur des siècles. « Quand on pense aux cathédrales gothiques, on voit immédiatement les pierres et moins la charpente et les armatures de métal, résume Mme Regert. L’incendie a mis au jour tout un chaînage d’agrafes, et les spécialistes se sont demandé si les armatures métalliques avaient été conçues dès le démarrage du chantier médiéval ou ajoutées après pour consolider les structures. »

Les agrafes ont bel et bien été systématiquement utilisées dès les premières étapes de la construction dans la seconde moitié du XIIe siècle, quelques décennies avant ce que pensaient les historiens. L’analyse des alliages ferreux contenant du carbone permet de dater les attaches et même de comprendre la provenance du métal et son recyclage très étendu. Une thèse de doctorat en cours porte précisément sur cet aspect.

Les découvertes seront transposables sur les chantiers de restauration d’autres monuments en France et en Europe. Un incendie a détruit la Bourse de Copenhague et sa flèche emblématique il y a trois semaines. L’avenir est aussi pris en compte autrement par les chercheurs français. Des équipes ont trié et stocké des débris évacués pour des études ultérieures, quand de nouvelles techniques de pointe permettront de raffiner encore les analyses.

Les présentations filmées du colloque devraient être disponibles en ligne dans les prochaines semaines. Un site de la Ville de Paris permet de suivre l’avancée des travaux de restauration de la cathédrale.

La flèche reconstruite a retrouvé sa place dans le paysage parisien depuis mars dernier. Il a fallu un échafaudage de 600 tonnes comptant 48 niveaux pour la reconstruire. La cathédrale avec son intérieur entièrement restauré, y compris les peintures murales du XIXe siècle et les vitraux nettoyés, miraculeusement épargnés par l’infâme journée du 15 avril 2019, rouvrira ses portes aux visiteurs à la fin de l’année.

L’émotion patrimoniale

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