Exposition à Paris : Rothko enchante la Fondation Louis Vuitton

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La précédente rétrospective du peintre américain Mark Rothko (1903-1970) avait eu lieu au musée d’Art moderne de Paris en 1999 et avait déjà Suzanne Pagé pour commissaire. Elle est ici associée à Christopher Rothko, le fils de l’artiste (du 18 octobre 2023 au 2 avril 2024 à la Fondation Louis Vuitton). Cette première présentation avait révélé l’artiste au public français, qui était resté médusé, surpris de découvrir un travail peu montré par les institutions françaises. Vingt ans plus tard, les choses ont changé.

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Un parcours intelligent et subtil

Rothko n’est plus une révélation. Le public s’est familiarisé avec son œuvre à coup de records de prix dans les ventes publiques, d’affiches diffusant ses toiles abstraites et colorées. Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’une révélation mais d’un constat. Constat de l’immensité de son œuvre, du lent passage de la figuration vers l’abstraction, de son combat acharné pour la peinture, de ses subtiles variations autour de la couleur, de son engagement et de sa ténacité. Grâce à un parcours intelligent et subtil et malgré des espaces parfois trop vastes pour des toiles nécessitant du recueillement, cette rétrospective Rothko réussit son pari et laisse les visiteurs pantois et ravis.

Mark Rothko, No. 14, 1960, huile sur toile, 290,83 cm x 268,29 cm, San Francisco Museum of Modern Art - Helen Crocker Russell Fund purchase © 1998 Kate Rothko Prizel & Christopher Rothko - Adagp, Paris, 2023

Mark Rothko, No. 14, 1960, huile sur toile, 290,83 cm x 268,29 cm, San Francisco Museum of Modern Art – Helen Crocker Russell Fund purchase © 1998 Kate Rothko Prizel & Christopher Rothko – Adagp, Paris, 2023

Figurations des années 1930

Chronologique, le parcours débute par des scènes figuratives, souvent des vues du métro new-yorkais, qui peuvent désarçonner le visiteur. En effet, le jeune Marcus Rotkovitch (né en 1903 à Dvirsk dans l’actuelle Lettonie et émigré à Portland en 1913) a été formé à l’Art Students League de New York dans les années 1930. C’est en 1938 qu’il prend le pseudonyme de Mark Rothko. Il peint des personnages sur les quais du métro et souligne la perspective des rails. On peut deviner, dans certaines parties de ces toiles, un goût pour l’abstraction et les aplats de couleurs sourdes (Entrance to Subway, 1938).

Vue de l'exposition « Mark Rothko », section « salle Scènes urbaines, métro et portraits », présentée du 18 octobre 2023 au 2 avril 2024 à la Fondation Louis Vuitton, Paris. © 1998 Kate Rothko Prizel & Christopher Rothko - Adagp, Paris, 2023

Vue de l’exposition « Mark Rothko », section « salle Scènes urbaines, métro et portraits », présentée du 18 octobre 2023 au 2 avril 2024 à la Fondation Louis Vuitton, Paris. © 1998 Kate Rothko Prizel & Christopher Rothko – Adagp, Paris, 2023

Monstres surréalistes

Inspirées des textes d’Eschyle et de Nietzsche, les toiles de Rothko des années 1940 se peuplent d’éléments organiques où l’on reconnaît ici un bras, là des yeux sur des fonds de couleurs. Des scènes historiques, proches de combats, rappellent le surréalisme européen fraîchement débarqué à New York. Rothko expose en 1944 à la galerie de Peggy Guggenheim, Art of this Century. Dans ses toiles surgit la même violence que dans celles de ses contemporains britanniques Graham Sutherland ou Francis Bacon.

Aeolian Harp N°7 (1946) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 (©Guy Boyer).

Aeolian Harp N°7 (1946) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 ©Connaissance des Arts/Guy Boyer

Verticales abstraites

Dès 1946, l’abstraction succède aux compositions surréalistes chez Rothko. Il ne donne plus de titres mais des numéros à ses toiles. Celles-ci deviennent verticales et se composent de rectangles superposés de couleurs chaudes. Elles sont traversées de lumière. A partir de la décennie suivante, il se limite à deux ou trois formes rectangulaires dont les bords vibrent et touchent les limites de la toile. Malgré leur apparente sérénité, Rothko assure : « J’ai emprisonné la violence absolue dans chaque centimètre carré de leur surface ».

À droite : N°21 (1949) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 (©Guy Boyer).

À droite : N°21 (1949) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 ©Connaissance des Arts/Guy Boyer

La lumière derrière la couleur

Par des formats qui deviennent de plus en plus grands, Rothko cherche à envelopper le spectateur et veut montrer la lumière derrière la couleur. Comment ne pas plonger dans ces surfaces jaunes qui semblent vivre devant nos yeux ? Les aplats ne sont pas unis mais, grâce à la couleur sous-jacente qui dépasse sur les bords, vibrent et passent du jaune à l’ocre. La bande centrale, blanche, agit comme un horizon, comme un contrepoint à cette lumière ensoleillée.

N°10 (1957) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 (©Guy Boyer).

N°10 (1957) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 ©Connaissance des Arts/Guy Boyer

Au Seagram Building

Conservées aujourd’hui à la Tate de Londres, ces toiles au reflet lie de vin ont été commandées par la Seagram pour décorer le restaurant construit par Philip Johnson en 1958. Rothko a testé des formats horizontaux pour qu’elles puissent être visibles au-dessus de la tête des convives. À partir de 1964, il utilise le noir qu’il mélange aux couleurs sombres (Black Forms) et imagine un ensemble de panneaux voulus par la collectionneuse Dominique de Ménil pour sa chapelle de Houston.

Rothko Room (1959) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 (©Guy Boyer).

Rothko Room (1959) de Mark Rothko, présenté dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 ©Connaissance des Arts/Guy Boyer

Quand Giacometti rencontre Rothko

Pour évoquer l’ultime commande d’une grande peinture pour le bâtiment de l’Unesco à Paris, l’exposition réunit la série des Black and Grey, variations autour de deux rectangles noirs et gris superposés, et la confronte à deux sculptures monumentales de Giacometti puisque l’artiste suisse aurait dû être associé à ce programme artistique malheureusement abandonné. À la rigueur et au minimalisme de Rothko répond le dynamisme de L’Homme qui marche. Aux lignes d’horizons traversant les toiles de Rothko s’oppose la verticale de la Grande Femme II, tendue vers le ciel.

Untitled (Black and Grey) (1969) de Mark Rothko, Grande Femme II et L’Homme qui marche (1960) d’Alberto Giacometti, présentés dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 (©Guy Boyer).

Untitled (Black and Grey) (1969) de Mark Rothko, Grande Femme II et L’Homme qui marche (1960) d’Alberto Giacometti, présentés dans l’exposition « Mark Rothko » à la Fondation Louis-Vuitton, Paris, 2023 ©Connaissance des Arts/Guy Boyer

« Mark Rothko »
Fondation Louis Vuitton, 75 116 Paris
du 18 octobre au 2 avril 2024


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