Alors que Notre-Dame de Paris s’apprête à rouvrir ses portes le 7 décembre après cinq ans de rénovation, la ministre de la Culture, Rachida Dati, propose de rendre l’entrée payante pour les visiteurs. Une idée qui suscite un vif débat en France.
Payer pour visiter une cathédrale. En France, l’idée surprend, tant l’accès libre aux lieux de culte est ancré dans les esprits. Mais Rachida Dati, ministre de la Culture, souhaite rompre avec cette tradition en imposant un droit d’entrée pour les visiteurs de Notre-Dame de Paris. À sa réouverture prévue les 7 et 8 décembre après cinq ans de travaux, la cathédrale pourrait voir chaque touriste s’acquitter de cinq euros. « Un tarif symbolique », justifie la ministre dans un entretien au Figaro, qui espère réunir 75 millions d’euros annuels, destinés à financer un « grand plan de sauvegarde du patrimoine religieux », géré par le Centre des monuments nationaux (CMN).
« La communion entre tous est l’essence même du lieu »
À Milan, Barcelone ou Londres, les touristes doivent déjà s’acquitter d’un droit d’entrée pour admirer le Duomo, la Sagrada Familia ou l’abbaye de Westminster. Dans ces lieux, un accès reste réservé aux fidèles. Un modèle qui a inspiré l’amendement au projet de loi de finances du député Horizons du Calvados, Jérémie Patrier-Leitus. Il propose de créer un « fonds de sauvegarde du patrimoine religieux » financé par un droit d’entrée alors que la France compte environ 71 000 lieux de culte, dont une part significative nécessite des travaux de restauration.
Mais si l’idée commence à prendre forme, elle peine à faire l’unanimité. « La mission fondamentale des églises est d’accueillir de façon inconditionnelle et nécessairement gratuite tout homme et toute femme », affirme le diocèse dans un communiqué. Instaurer un droit d’entrée reviendrait à briser « la communion entre tous, qui est l’essence même du lieu ». L’opposition à cette idée s’appuie sur un argument de poids : la loi de 1905, garantissant la séparation des Églises et de l’État, qui stipule, à son article 17, que « la visite des édifices et l’exposition des objets mobiliers classés seront publiques : elles ne pourront donner lieu à aucune taxe ni redevance ».
Un tarif différencié pour les touristes étrangers ?
Ce n’est pas la première fois qu’un droit d’entrée pour les cathédrales fait débat. En 2017, Stéphane Bern, alors chargé d’une mission sur le patrimoine, avait déjà proposé que les visiteurs contribuent financièrement à l’entretien des cathédrales, suscitant l’indignation du clergé. La Conférence des évêques de France avait rappelé que, bien qu’inscrites au patrimoine national, les cathédrales sont avant tout des « lieux de prière et de culte, dont l’accès doit être libre ».
Toutefois, Rachida Dati se veut pragmatique. Pour elle, « on n’a pas besoin de remettre en cause la loi de 1905 pour récupérer des fonds ». Certains édifices en France ont d’ailleurs déjà adopté des systèmes de tarification partielle, comme la cathédrale Sainte-Cécile d’Albi. La loi permet effectivement des droits d’entrée pour certaines parties d’édifices religieux, comme les tours, cryptes ou trésors.
Au-delà des questions juridiques, cette proposition rouvre un débat fondamental : la préservation des églises doit-elle passer par une révision du modèle de gratuité ? Pour la ministre, cette démarche reflète une nécessité économique. « Il faut être innovant, sinon, on met des impôts partout et on ferme la boutique », a-t-elle affirmé lors de son audition budgétaire. Elle avait même envisagé de différencier les tarifs pour visiteurs français et étrangers, bien que l’idée ait été écartée en raison des règles européennes de non-discrimination. À quelques semaines de l’ouverture de Notre Dame de Paris, bien que le sujet divise en France, il a le mérite d’ouvrir le débat sur l’avenir du patrimoine religieux.
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