Très nombreuses dans les rues de Paris, sur les façades des immeubles ou des bâtiments publics, les plaques mémorielles font partie du paysage au point qu’on ne les remarque presque plus. Pourtant, tantôt laconiques, tantôt riches en détail, ces inscriptions racontent un peu de notre histoire. Une universitaire, Céline Largier Vié, s’est lancée depuis 2021 dans une vaste entreprise de recensement et d’analyse de toutes les plaques relatives à la Seconde Guerre mondiale – lesquelles représentent à elles seules près de la moitié des plaques mémorielles de la capitale, souligne la chercheuse.
Comment cette linguiste, agrégée d’allemand et maître de conférences en linguistique allemande et française à la Sorbonne Nouvelle, en est-elle venue à travailler sur ces témoignages ? Céline Largier Vié s’est « depuis longtemps intéressée aux objets de mémoire, en particulier les monuments aux morts et les plaques commémoratives », explique-t-elle à « l’Obs ». En 2021, elle s’est aperçue qu’il n’existait pas de travaux de recherche approfondis sur ces inscriptions spécifiques et s’est lancée dans cette recherche.
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Elle reprend à son compte la phrase « Au départ, c’est une émotion » de Philippe Castetbon dans son livre « Ici est tombé » (éditions Tiresias, 2004) – pour lequel ce journaliste a rencontré des descendants de personnes mentionnées sur des plaques.
Plongée dans les archives
Que regarde Céline Largier Vié ? Les noms, les formulations très variées – « une plaque apposée en 1944 et une plaque de 2023 ne s’adressent pas aux mêmes publics et ne disent pas la même chose » – et leurs contextes. Une recherche qui nécessite « beaucoup de temps dans les archives et dans les livres, y compris pour savoir ce que les plaques ne racontent pas. Derrière chacune d’entre elles, il y a un destin, une vie brisée, et des profils très variés. »
Marcel HAUVILLE, 21 ans,
externe des hôpitaux
médecin du poste FFI du IVe arrt
Mathieu KERVELLA, 26 ans,
contrôleur des douanes
secouriste du poste FFI du IVe arrt
sont morts pour la France
20 Août 1944 »
Plaque au 45 rue de Lyon, Paris 12e ((C) CÉLINE LARGIER VIÉ)
La linguiste a d’abord mené un inventaire dans tout Paris intra muros, listant plus de 1 600 plaques. « Les premières inscriptions ont été faites pendant les jours mêmes de l’insurrection de Paris, parfois sous forme provisoire – un morceau de carton, un panneau en bois, un message à la craie sur un mur », remplacées ensuite par des plaques plus durables. Et les plus récentes ont été apposées ces dernières années, voire ces derniers mois : en mai 2023, dans le 3e arrondissement, une nouvelle plaque en hommage aux 3 710 juifs arrêtés lors de la « rafle du billet vert » de 1941 a été dévoilée – il y en a maintenant six au total.
D’autres plaques sont encore en projet, « c’est une mémoire qui reste très active ».
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Pour sa patiente recension, Céline Largier Vié a entre autres utilisé une base de données en open data (données numériques ouvertes, dont l’accès et l’usage sont libres), les quelques livres sur le sujet, comme « Enfants de Paris (1939-1945) » (Gallimard, 2018) de Philippe Apeloig. Et elle a photographié la totalité des plaques qu’elle a trouvées en sillonnant la capitale (toutes les photos illustrant cet article et les suivants de cette mini-série sont d’elle).
Plaque au 9 rue Caulaincourt, Paris 18e : un mort dont on ne sait encore rien hormis son nom : déporté parce que résistant, juif, autre ? ((C) CÉLINE LARGIER VIÉ)
jeune héroïne morte pour la France »
39 rue Chapon, Paris 3e (autre exemple d’une personne sur laquelle aucune information n’est disponible) ((C) CÉLINE LARGIER VIÉ)
Cette première étape achevée (un an et demi de travail), elle s’est penchée sur les textes et fait des recherches sur les personnes et les événements mentionnés, notamment au Département d’Histoire, de la Mémoire et des Musées associatifs (DHMMA) de la Ville de Paris (en charge de la gestion des plaques), au Service historique de la Défense (SHD) de Caen, et aussi sur l’histoire des plaques elles-mêmes – leur pose, leurs remplacements ou disparitions parfois, etc. : « J’ai aussi, grâce à RetroNews [journaux anciens numérisés et mis en ligne par la Bibliothèque nationale de France], pu collecter des articles de journaux rendant compte de cérémonies de pose de plaques, pour les plus anciennes. »
La plupart des plaques que l’on voit maintenant ne sont pas d’origine, elles ont été remplacées parce que très abîmées par le temps.
La Libération inscrite dès 1944, la Shoah bien plus récemment
Des plaques ont définitivement disparu (on le sait parce qu’elles sont mentionnées dans les archives). Quelques-unes après la Libération mentionnaient « les Boches » : le mot y a été remplacé par « Allemands » ou « nazis », sauf sur deux – dont une se trouve sur un immeuble privé. Les copropriétaires, dont l’autorisation est nécessaire, ont refusé, considérant que cette plaque appartient à l’histoire. Place Martin Nadaud dans le 20e, une plaque en mémoire d’un faux groupe de résistants a été retirée.
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Certaines ne sont habituellement pas accessibles au public, comme celle installée dans l’Hôtel de Ville (ci-dessous) ou cette autre dans un local de la Banque de France, ou encore celles dans les écoles et autres établissements d’enseignement.
Inscription sur une ardoise à l’entrée du métro, disparue depuis. ((C) CÉLINE LARGIER VIÉ)
Céline Largier Vié classe ces plaques en quatre catégories, dans un ordre non chronologique mais correspondant peu ou prou à l’ordre de leur apparition :
– la Libération de Paris,
– les faits de guerre,
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– la Résistance (ces deux dernières catégories ont été commémorées à peu près en même temps),
– la persécution des juifs – essentiellement posées à partir des années 1990 (la première plaque sur des enfants déportés et assassinés ne mentionnait même pas le mot « juif »).
Les morts des faits de guerre sont ceux tombés pendant la bataille de France, jusqu’à l’armistice de juin 1940, et après la Libération de Paris, avec la poursuite des combats vers l’Est. Elles reproduisent souvent la présentation des plaques de la Première Guerre mondiale.
Les articles suivants vont porter sur les plaques relatives à la Libération, la Résistance et la Shoah. La chronique a été générée aussi sérieusement que possible. Dans la mesure où vous désirez mettre à disposition des renseignements supplémentaires à cet article sur le sujet « Découverte de paris » vous pouvez utiliser les contacts affichés sur notre site web. Le but de aquarelleparis.fr est de débattre de Découverte de paris dans la transparence en vous donnant la visibilité de tout ce qui est mis en ligne sur ce thème sur le net Cet article, qui traite du thème « Découverte de paris », vous est volontairement proposé par aquarelleparis.fr. Connectez-vous sur notre site internet aquarelleparis.fr et nos réseaux sociaux pour être informé des prochaines publications.